Plusieurs étapes interviennent dans la création du mécanisme de compensation carbone.
1920 : l’écotaxe
Arthur-Cecil PIGOU, économiste libéral britannique, met en lumière le problème des externalités. Ce terme recouvre les impacts, positifs ou négatifs, qu’une activité économique peut avoir sur d’autres acteurs sans qu’ils soient reflétés dans le prix final.
Pigou prend pour exemple les escarbilles, ces morceaux de charbon incandescents qui sont éjectées par la cheminée des locomotives de l’époque et qui provoque des incendies à proximité des voies de chemins de fer. Il s’agit d’un cas typique d’externalité négative : l’activité ferroviaire crée un préjudice économique et environnemental pour lequel la société de chemin de fer ne paie pas.
Pigou suggère donc que l’Etat impose aux sociétés de chemin de fer une taxe assise sur les risques de dommages provoqués par les escarbilles. Cette taxe devrait inciter les sociétés de chemins de fer à équiper leurs locomotives de systèmes anti-escarbilles et permettra également de dédommager les victimes. La première écotaxe vient de voir le jour.
1960 : les droits à polluer
Un autre économiste, Ronald Coase, critique cette solution fiscale qui repose en grande partie sur l’intervention de l’état et qui nuit à l’efficacité économique du système : il implique une augmentation du prix du billet de train. Coase propose donc d’attribuer des droits de propriété de l’environnement. En clair, soit on considère que l’agriculteur ou le propriétaire de la forêt a le droit de ne pas être victime d’incendie, soit on considère à l’inverse que la compagnie de chemins de fer a le droit de les provoquer. Ensuite, ces droits sont échangeables sur un marché par transactions privées entre les différents acteurs concernés.
1990 : le programme Acid Rain
Au sein d’un vaste plan de lutte contre une pollution atmosphérique persistante, le Clean air act, les Etats-Unis introduisent un volet pour régler le problème des pluies acides, provoquées notamment par la combustion du charbon dans les centrales électriques thermiques, qui émet de fortes quantités de dioxyde de souffre (SO2) : le programme Acid Rain.
Il prévoit un véritable marché des droits à polluer, suivant en cela les préconisations de Coase.
En fonction d’un objectif de réduction fixé à l’avance, le pouvoir politique attribue aux industriels ce que l’on peut concevoir comme des tickets de rationnement de SO2, appelés « permis d’émissions ».
A la fin de l’année, l’exploitant est tenu de présenter aux autorités autant de permis que de tonnes de SO2 réellement émises. Entre les deux, le marché, qui autorise un échange de quotas entre les acteurs, sans droit de regard des autorités.
Cette technique des quotas échangeables, appelée Cap and trade (attribution d’un plafond d’émissions – cap – et échange sur un marché – trade) constituera le socle des mécanismes du protocole de Kyoto. Ce sont donc les Etats-Unis, sur la base des résultats positifs de leur programme Acid Rain, qui auront façonné le protocole de Kyoto…sans jamais le ratifier.
1997 : Kyoto et la compensation carbone
Première prise de conscience internationale de l’impact des émissions de gaz à effet à serre sur le climat et première volonté politique de les limiter, le protocole de Kyoto a été adopté en 1997 via la Convention-Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques (CCNUCC).
Parmi les 172 pays qui l’ont ratifié, 38 pays (dits de l’Annexe 1) se sont engagés à limiter et à réduire globalement de 5,2 % par rapport à 1990 (8% pour l’Europe) leurs émissions de gaz à effet de serre sur la période 2008-2012. L’entrée en vigueur du protocole était conditionnée par l’adhésion de ces 38 pays, représentant au moins 55% des émissions de gaz à effet de serre en 1990.
2015 : COP21 et l’Article 6 de l’Accord
Cet article esquisse les nouveaux mécanismes climat qui seront mis en œuvre à partir de 2020 pour atteindre notamment les objectifs des contributions nationales des pays (INDC).